Décès d’Elizabeth 2 : le témoignage d’un habitant de Loire-Atlantique
9 septembre 2022 à 14h55 par Maëva Bossard
Originaire de Notre-Dame-des-Landes en Loire-Atlantique, Alain Audrain vit le décès de la Reine de l’intérieur. Après avoir vécu à Londres, il réside aujourd'hui à Brighton où il travaille pour Apple.
Les Britanniques sont en deuil depuis l'annonce de la disparition de la reine Elisabeth II. Ces derniers entrent par ailleurs dans une période de deuil de sept jours. Parmi eux, Alain Audrin, un Français qui habite à Brighton en Angleterre se dit "choqué" de cette annonce.
Où étiez-vous quand vous avez appris la mort de la Reine hier soir ?
Moi, j’étais au travail, je travaille dans un magasin. Pendant tout l’après-midi, on a eu des rumeurs, en fait, qu’elle n’allait pas bien. On en blaguait même avec mes collègues. Jusqu’à ce qu’on ait eu l’annonce officielle... On a vu comme un voile passer sur tous nos visages. C’est vrai que ça nous a un peu choqués.
Même si la Reine avait 96 ans, donc, on pouvait se douter qu’elle n’avait plus beaucoup d’années à vivre, mais finalement, ça a été soudain parce que mardi on l’a vu avec la Première ministre, en plus.
Complètement, c’est ça en fait. Notre nouvelle Première ministre a pris le pouvoir mardi et est allée la voir en Ecosse, elle est revenue et on a perdu notre Reine. Ça nous a quand même choqués. Certes, on s’y attendait mais c’est comme une grand-mère qui meurt dans notre vie. On sait qu’elle ne peut pas durer éternellement mais ça choque quand même.
En sortant du magasin dans lequel vous travaillez hier soir, est-ce que vous avez ressenti aussi cette tristesse dans les rues ?
Je pense que si j’habitais à Londres, ça aurait été différent. Moi, j’habite à Brighton dans le sud de l’Angleterre. A Londres, il y avait beaucoup de gens dans la ville qui faisaient leur deuil. A Brighton, c’était un peu différent, les gens finissaient le travail et voulaient rentrer chez eux. Mais, sur les réseaux sociaux, en parlant avec des amis, on voit quand même un deuil qui passe.
Comment, justement, est-ce que les médias britanniques réagissent depuis l’annonce de cette disparition ? On imagine que les images de la Reine et les réactions tournent en boucle à la radio et à la télé en ce moment.
Oui, complètement. Bien sûr, ça ne parle que de ça. C’est triste, c’est triste…
Pour vous, Français installé depuis plusieurs années en Angleterre, que représente la Reine ?
C’est bizarre parce que, moi, Français installé en Angleterre depuis 18 ans, j’ai quand même un passeport français mais je passe, disons, 45 semaines de mon année en Angleterre, donc, je me sens un petit peu plus britannique que français. Donc, ça touche quand même et, moi, j’ai toujours été attiré par la culture britannique, donc oui, ça me touche quand même.
Quand est-ce que vous êtes arrivé en Angleterre ?
Je suis arrivé en mars 2004. C’est vrai que même avant, j’ai étudié l’anglais à l’université, j’étais toujours très attiré par la culture britannique, donc, je fais partie de ce groupe, en fait.
Est-ce que vous suivez, très régulièrement, tous les événements liés à la Famille Royale ? C’est-à-dire dans les tabloïds mais aussi les événements officiels, par exemple, le jubilé de platine en juin dernier, est-ce que vous avez suivi ça ?
C’est marrant mais, justement, le jubilé de platine en juin, j’étais en France, donc, je n’ai pas pu le voir en direct, je l’ai vu à la télé. Et pour les funérailles, je serai aussi en France parce que je rentre la semaine prochaine. C’est bizarre, j’ai l’impression de tout louper.
Le prince Charles devient, donc, roi Charles III. Comment est-ce que les Britanniques perçoivent l’arrivée du prince Charles qui devient roi sur le trône ?
Ça, c’est vraiment le terme qui fait bizarre à dire. Se dire qu’on a un roi maintenant plutôt qu’une reine, c’est le terme qui fait vraiment bizarre à dire. On est aussi habitués, on a toujours eu une reine, ça faisait 70 ans qu’elle était sur le trône. On n’a pas connu autre chose, donc, c’est ça qui fait vraiment bizarre. Ce qui fait aussi un peu peur, c’est ce qui se passera dans le futur. Est-ce qu’on aura des nouveaux billets ? Des nouvelles pièces ? De nouveaux timbres ? Un nouvel hymne national ?... Ça fait peur.
Comment est perçu le roi Charles III par les Britanniques ?
Il est remonté dans l’estime des Britanniques ces dernières années. Camilla a aussi été très acceptée. Donc, je pense qu’il sera bien accepté comme roi.
Malgré ses 73 ans, il peut faire figure de roi moderne ? On sait que c’est un fervent défenseur de l’environnement, notamment.
Oui, ça peut faire beaucoup de choses pour l’environnement de l’avoir au pouvoir, ça peut aider beaucoup. Mais, si ça ne tenait qu’à moi, je passerais directement le flambeau à William pour avoir un roi jeune.
Directement, le roi William sans passer par la case Charles, finalement ?
Je pense, parce qu’avoir un jeune roi pourrait faire avancer certaines choses dans le pays qui est très retardataire, parfois. Mais aussi, on aurait un roi qui durerait longtemps dans les années.
Est-ce que, vous, vous avez eu l’occasion d’aller un jour devant Buckingham Palace ?
Bien sûr ! Dès que ma famille ou des amis me visitaient, c’était l’arrêt obligatoire. Il y a plusieurs choses à voir à Londres, mais Buckingham Palace, on ne peut pas le manquer.
Est-ce que vous avez aperçu un jour le chapeau de la Reine ?
Non (rires). C’est marrant parce qu’il y a un drapeau, en fait, sur Buckingham Palace qui nous dit quand la Reine est là ou pas. C’est sympa de savoir qu’on est à quelques dizaines de mètres de la Reine quand on voit le drapeau levé. Mais non, je n’ai pas eu cette chance.
Est-ce que vous faites partie des collectionneurs de tasses, de photos, de journaux à l’effigie de la Reine ?
Moi, personnellement, pas du tout. Il y a toujours un petit mug qui traîne d’anciens locataires, mais qui m’appartient personnellement, non, je n’en ai pas.
Ces prochains jours, est-ce que vous allez suivre un peu le déroulement de tout ce qu’il va se passer ?
Oui, je pense. C’est une date à mettre dans les annales. Ce qu’il se passe en ce moment, c’est quelque chose d’important, donc oui. Hier, quand je suis rentré du travail, la première chose que j’ai faite, c’est allumer ma télé. Ce soir, ce sera la même chose, je veux voir ce que le roi Charles III a dit et je voir ce qu’il se passe, vraiment.
Avez-vous le sentiment un peu privilégié de vivre ce moment historique en étant sur le sol britannique ?
Complètement ! On est là et j’ai un peu de regrets d’avoir quitté Londres pour ne pas pouvoir y aller, parce qu’il faut que j’aille au travail. Mais oui, j’ai plusieurs amis qui étaient à Londres, qui étaient devant Buckingham Palace, qui étaient à Piccadilly Circus aussi où ils ont mis une grande photo de la Reine et où tout était éteint. J’aurais voulu voir ça, comme le jubilé que j’ai un peu loupé. Mais, être sur le sol britannique, ça attire un peu d’importance, oui.
Quelle image garderez-vous de la Reine ?
Je pense que c’était quelqu’un de très professionnelle, qui a très bien exercé son métier, à ce qu’elle devait faire. Je dirais, la seule image mauvaise que j’ai de la Reine, c’est quand Diana est morte et qu’elle n’est pas sortie pendant plusieurs jours pour rencontrer le public. Elle l’a fait, finalement. Mais, c’est vraiment la seule image mauvaise que je retiens d’elle. Pour le reste, quelqu’un que j’admire vraiment, oui.
Quelqu’un qui, finalement, sous son aspect très stoïque pouvait être aussi assez cool en s’affichant aux côtés des stars ?
Oui, quelqu’un qui, je pense, était très famille aussi. Cette fameuse photo du prince Harry dans son uniforme d’armée, quand il arrive devant elle, ils se sourient l’un à l’autre, c’est très chaleureux.
Entretien d'Alexandrine Douet retranscrit par Mikaël Le Gac.