Le chant du cygne pour le coq Maurice à Oléron ?
5 septembre 2019 à 5h00 par Arnaud Laurenti
Le tribunal correctionnel de Rochefort se prononce ce jeudi sur le cas du Coq Maurice de l'Île d'Oléron. Les voisins de sa propriétaire lui reprochent d'être trop bruyant et demandent son départ.
Le coq Maurice dont le cocorico matinal est contesté en justice, pourra-t-il continuer à chanter sur l'île d'Oléron ? Le tribunal de Rochefort rend sa décision aujourd'hui.
Devenu le symbole du clivage ville/campagne
La décision du tribunal correctionnel, qui ne sera pas rendue en audience publique mais déposée au greffe, est attendue en début d'après-midi.
Si le jugement est favorable aux demandes des plaignants, la propriétaire de Maurice, Corinne Fesseau, issue d'une vieille famille oléronnaise, aura 15 jours pour éloigner l'animal ou le faire taire. Si elle ne s'y soumet pas, elle devra verser 150 euros d'astreintes quotidiennes ainsi que 1.000 euros de dommages et intérêts à ses voisins.
Article dans le New York Times, Tee shirts "Let me sing" (Laissez-moi chanter) de la "Team Maurice", pétition pour "sauver Maurice" (140.000 signatures), le gallinacé de Saint-Pierre-d'Oléron est devenu en quelques mois le symbole de la ruralité menacée.
Au départ, une plainte pour trouble anormal du voisinage a été déposée par un couple d'agriculteurs retraités domicilié en Haute-Vienne, incommodés par le chant trop matinal de Maurice près de leur résidence de vacances.
Déplacement du poulailler, film noir autour de sa cabane pour l'empêcher de chanter avant 8h30, rien n'y a fait. Maurice a continué à chanter aux premières lueurs de l'aube et aucune conciliation n'a pu avoir lieu entre les parties.
"Accepter les traditions"
Lors de l'audience le 4 juillet, Maurice a été accusé d'être une "nuisance sonore". "Le coq, le chien, le klaxon, la musique, c'est le dossier du bruit", avait plaidé Me Vincent Huberdeau, avocat des plaignants, en refusant l'idée du procès "de la ville contre la campagne", d'un "conflit entre citoyens bobos et ruraux".
Chacun s'était aussi demandé si Saint-Pierre-d'Oléron était une commune rurale ou une zone urbaine où un coq n'avait donc pas sa place.
Pour Me Huberdeau, Saint-Pierre-d'Oléron est "la plus grosse commune de l'île d'Oléron avec près de 7.000 habitants en hiver et 35.000 en été. Mes clients vivent dans une zone classée pavillonnaire au Plan local d'urbanisme. Ce n'est pas la campagne".
Ce à quoi avait objecté Me Julien Papineau, qui défend les intérêts de Mme Fesseau : "Je ne suis pas sûr que les plaignants se sont dits on va acheter une maison à la ville, sur l'île d'Oléron !".
"Nous sommes ici au paroxysme de l'intolérance, il faut accepter les traditions locales", a dénoncé à l'AFP Christophe Sueur, le maire (DVD) de la commune qui avait pris un arrêté municipal en juillet 2018 pour rappeler l'aspect rural de la commune et prendre le parti de sa résidente permanente.
Procès du bruit ou chicanes de voisinage, Maurice est devenu le symbole du conflit entre ruraux et nouveaux arrivants.
Et il n'est pas le seul. Il a été depuis rejoint par des canards des Landes qui caquètent, aux côtés ces derniers mois de cloches qui sonnent, de grenouilles qui coassent et de cigales qui craquettent trop fort.
Au point d'amener le maire du petit village de Gajac en Gironde à proposer le classement de ces bruits au patrimoine national et fonder l'association L'Echo de nos campagnes, pour "protéger notre monde rural et nos traditions".
(avec AFP)